Les ateliers



DESANA

Desana est une petite bourgade rurale située à 8 km de Verceil chef-lieu de la province du même nom dans le Piemont.

Au XVe siècle, Desana est le fief de la famille Tizzone.

L'histoire monétaire de Desana a, sans doute, commencé avec le comte Louis II, puisque aucun document ou monnaie n'a été jusqu'à maintenant retrouvé pour pouvoir attribuer le ''début'' à l'un de ses prédécesseurs.

Le décret par lequel Louis II a le droit d'ouvrir un atelier à Desana n'apparaît dans aucun documents; il semblerait qu'il ait employé le droit de battre monnaie grâce à une ''trop large'' interprétation du diplôme impérial de 1510 par lequel l'empereur lui conférait la dignité de ''son Vicaire à Desana''.*

En 1559 Augustin Tizzone reste l'unique possesseur de Desana.

Avide d'argent, il rend l'atelier de Desana ''célèbre'' pour la quantité de monnaies contrefaites, encore plus nombreuses que celles de ses prédécesseurs qui avaient déjà utilisé ce système frauduleux dans un but lucratif.*

L'industrie principale, on pourrait dire absolue, de la monnaie de Dezana a consisté pendant fort longtemps dans la contrefaçon des espèces étrangères.

Peu de pays ont échappé à cette redoutable opération. Une grande partie de ces contrefaçons a eu pour but d'imiter la monnaie royale ou féodale française.

Aussi trouvons-nous de nombreuses ordonnances qui prohibent le cours de ces pièces frauduleuses, à bien des reprises, témoignant par là d'une circulation persistante et prolongée.**

Sous le gouvernement des Tizzoni, Desana connaît des moments terribles, à tel point qu'en 1567, tous les habitants fuient désespérés pour demander secours au duc de Savoie.*

L'atelier de Dezana cessa probablement de fonctionner pendant les treize années qui s'écoulèrent entre 1567 et 1580.

Des falsifications de toute nature avaient provoqué l'indignation générale; banni des États de Savoie en 1567, condamné par contumace en 1569, à la peine de mort et à la confiscation de ses biens par le sénat de Montferrat.

Jean Augustin dût renoncer à sa fabrication illicite et ne tenta de la reprendre que peu de temps avant son expulsion arrivée en 1581.

Jean Augustin, expulsé de Dezana, en 1581 mourut peu après.

Il avait, en 1580, rouvert la monnaie fermée depuis longtemps.

Roland Gastaldo, maître de la monnaie à cette époque, signe ses pièces des initiales R.G., ou seulement G., et imprime à l'imitation des diverses monnaies françaises une impulsion qui va s'accroître d'une façon prodigieuse dans les années suivantes.**

Delfino, fils de Jean-Marie Tizzone, prend possession de Dezana au commencement de 1582, reçoit l'investiture impériale l'année suivante, et, continuant Roland Gastaldo dans ses fonctions de maître de la monnaie, se livre à une fabrication considérable de pièces imitées de celles de France et d'Italie.**

L'activité de l'atelier de Desana dura pendant plus de 250 ans.*

Ce fief fut vendu au duc de Savoie Victor-Amédée II en 1693 et ainsi définitivement réuni à la couronne de Savoie.

 

 * Elio Biaggi, Monnaies d'Italie, Savoie Piémont - BNF

** A. Morel-Fatio, Monnaies inédites de Dezana, Frinco et Passerano 1866.



FRINCO

Frinco, petit fief impérial situé au territoire d'Asti, fut acheté en 1442, par la famille des Mazetti.**

En 1487, ils obtiennent de l'empereur Frédéric III entre autres privilèges celui de battre monnaie. Ils n'utilisent cette faculté que plus tard, dans la seconde moitié du XVIe siècle et avec le nom général de leur ''consortium''.*

L'atelier de Frinco ouvert en 1581, ou peu avant (des lettres patentes du duc Charles Emmanuel Ier, en date du 13 mai 1581, parlent de la monnaie de Frinco nouvellement ouverte), fut exclusivement établi en vue d'imiter ou de contrefaire les monnaies étrangères.

Frinco n'a jamais eu de type local et lui appartenant en propre; le bénéfice illicite des contrefaçons fut l'unique mobile de sa fabrication monétaire.**

Roland Gastaldo, maître de la monnaie de Dezana et de Saint-Bénigne de Fruttuaria, a dû l'être aussi pour Frinco à ses débuts.

Il exerçait cette charge en raison d'une autorisation sollicitée par lui et obtenue d'Emmanuel Philibert en 1578.

On peux croire que Roland Gastaldo a dirigé la monnaie de Frinco, mais pour être exact il convient de dire que c'est seulement une hypothèse, et qu'à Frinco aucune monnaie ne porte les initiales R.G., comme on les a vues à Dezana.

Il se peut aussi que Tomaso Roglia, maître de la monnaie de Passerano, neveu et associé de Roland Gastaldo, l'ait secondé dans la fabrication ou même l'ait remplacé.**

Un monnayage commencé sous de pareils auspices ne pouvait être de longue durée, et vingt années ne s'étaient pas écoulées depuis son installation, que le duc de Savoie mû par ses propres griefs (et sollicité sans doute par le doge Marino Grimani, dont les Mazzetti contrefaisaient la monnaie), ordonnait la fermeture de l'atelier de Frinco, la saisie du matériel et l'incarcération de tout le personnel (ordonnance du 20 février 1601).**

À partir de cette catastrophe, il ne paraît pas que l'on ait tenté de recommencer les opérations de la monnaie.

Hercule et Jules César Mazzetti, cités au tribunal de l'empire en 1609, furent enfin dépouillés de leur fief en 1611, par sentence de l'empereur Rodolphe II, et au profit d'un baron allemand du nom de Reineck.

Celui-ci peu désireux de conserver sa nouvelle seigneurie et le droit de monnaie qui y restait attaché, vendit le tout au duc de Savoie en 1614.

Plus tard, les Mazzetti recouvrèrent Frinco, mais cette fois sans le droit de monnaie.**

  

* Elio Biaggi, Monnaies d'Italie, Savoie Piémont - BNF

** A. Morel-Fatio, Monnaies inédites de Dezana, Frinco et Passerano 1866.

 

 

PASSERANO

Commune du bas Montferrat, Passerano est situé dans la province d'Asti, au nord de la ligne de partage des eaux entre le Pô et le Tanaro.

Passerano est le siège de l'atelier des Radicati, comtes de Cocconato.

La famille Radicati a des origines incertaines. Ils créent un comté rural qui réunit un grand nombre de terres.

La terre de Radicata est située sur le rive droite du Pô près de Saint-Sébastien, là où existait un prieuré dit de Saint-Michel de Radicata.

Après la fin du XIVe siècle les Radicati ont le titre de comte de Cocconato et sont des vassaux directs de l'Empire.

Ils se divisent ''ab antiquo'' en trois lieux, parmi lesquels Casalborgone qui change son nom en Passerano.

C'est le plus important des trois bourgs où les descendants de la branche aînée de la famille exercent leur souveraineté sur la totalité du comté formé de 23 importantes localités du bas Montferrat.*

Le premier document authentique par lequel est concédé aux Radicati le privilège de battre monnaie est du 29 janvier 1530.

Sur ce diplôme, l'empereur Charles Quint concède au consortium des représentants de tous les comtes de Cocconato, de Jean Second de Brozolo et de Boniface de Robella, le droit ''aurum et argentum cudenti''.

À cause de l'état de guerre existant alors sur ces terres, les premières monnaies frappées par les Radicati à Passerano sont émises seulement en 1581.

Il s'agit vite d'une émission monétaire de bas aloi, presque toutes des contrefaçons de monnaies de grands ateliers.*

Les travaux de ce nouvel atelier, exclusivement consacré à la contrefaçon, furent dirigés par les maîtres que nous avons déjà vus à Frinco et à Dezana.**

Le duc de Savoie, suite au dommage économique causé par ces nombreuses émissions frauduleuses, interdit la circulation des monnaies basses de Passerano dans tous ses États.

Un accord avec le duc est conclu le 8 février 1586, mais les choses ne changent pas.

De plus depuis 1594 les monnaies de l'atelier de Passerano ne sont plus battues au nom du consortium, mais exclusivement au nom des membres de la famille à Passerano.

Le 15 avril 1598, le duc Charles EMMANUEL Ier de Savoie, conclut un accord avec les Radicati.

Ils renoncent au droit de battre monnaie, contre une compensation de 420 écus et une attribution annuelle de 300 écus d'or sur la taxe du comté.

L'atelier cesse son activité en 1598.*

 

* Elio Biaggi, Monnaies d'Italie, Savoie Piémont - BNF

** A. Morel-Fatio, Monnaies inédites de Dezana, Frinco et Passerano 1866.

 

 

 CASALE

Ville du bas Montferrat, dans la province d'Alessandria, Casale est située dans une plaine entre les contreforts orientaux des collines du Pô et sa rive droite.*

Refondé sous Frédéric II, le bourg passe, en 1303, aux Aleramici, marquis de Montferrat, mais dans la branche des Paléologues.

Sous Guillaume VIII de Montferrat (1464-1483) Casale devient capitale du marquisat, prend le titre de ville et un sénat y est créé.

En 1533, la branche des Paléologues s'éteint et la ville est occupée par Charles Quint.

Après la paix de Chateau-Cambrésis, en 1559, il la donne aux Gonzagues de Mantoue, héritiers par voie féminine des Paléologues.

Casale est vraiment assiégée par les espagnols durant la guerre de succession de Mantoue et du Montferrat (1628-1631).

Défendue par les français, elle en subit l'occupation jusqu'en 1652.

Assigné aux Gonzagues, Casale est vendue à Louis XIV en 1681.

En 1695, suite aux accords entre le roi de France et le duc de Savoie, les fortifications sont abattues et la ville est cédée au duc de Mantoue.

En 1704, s'éteint la dynastie des Gonzagues; Casale et le Montferrat passent à la Savoie; le traité d'Utecht confirme définitivement ce changement en 1713.*

 

* Elio Biaggi, Monnaies d'Italie, Savoie Piémont - BNF

 

 

MESSERANO

Dénommé dans le passé Massaranum Messerano est actuellement un centre industriel dans la province de Bielle, situé sur une colline dominant vers le sud la plaine de Vercelli.

 La maison des Fieschi comtes de Lavagna descend d’une des plus illustres familles de Genes.Vers 1370, Jean Fieschi, nommé évêque de Vercelli par Clément VI en 1348, pour pouvoir défendre les possessions de son Église contre les invasions des feudataires limitrophes, concède en fief à son frère Nicolas, les terres de Messerano et Crevacuore dépendantes de l’église de Vercelli.A la mort de Nicolas l’investiture du fief passe à ses fils Ludovic et Antoine.

En 1384 Ludovic devient aussi évêque de Vercelli et le pape Boniface IX confirme aux frères l’investiture et le «condominio» de Messerano dont le gouvernement passe ensuite aux descendants d’Antoine. Le pape Jules II élève le fief en comté le 7 novembre 1506.

 Les Fieschi, utilisant le droit de battre monnaie concédé à leur maison par Guillaume roi des Romains en 1249, l’exercent dans l’atelier de Messerano à la fin du XVe siècle : d’abord avec une série «anonyme» mettant sur les monnaies le seul nom de leur terres puis ajoutant aussi celui de leur famille.

Les monnaies «anonymes des Fieschi» sont battues dans l’atelier de Messerano de 1492 à 1521. Durant cette période sont émis : ongari, écus d’or au soleil, contrefaçons de cornut, quarts, terlines et monnaies de Bellinzona, de Bologne, de Lausanne, de Saluces et de Milan.

De 1521 à 1528, les cousins Ludovic II et Pierre Luc Fieschi battent durant 7 ans de la monnaie avec leurs noms jumelés à Messerano dans les trois métaux : or, argent et billon : écus d’or au soleil, testons, conuti, cavallotti, rolabasses.

Aucun exemplaire de ces monnaies n’est actuellement présent dans le médailler de la Bibliothèque nationale de France.

 De 1528 à 1532 Ludovic II seul, d’abord comme seigneur puis comme comte de Messerano frappe monnaie dans les trois métaux : or, argent et billon. Il frappe à son nom, soit des contrefaçons en billon.

En or : doppie - ducats et écus au soleil ; en argent : testons, cornuts, cavalletti ; en billon : les contrefaçons de Constance, rolabasses, demis-gros et monnaies du Tyrol.

De 1528 à 1548 Pierre Luc II Fieschi bat monnaie à Messerano en son seul nom jusqu’en 1548, lorsque le 28 janvier de cette année le pape Paul III ne déclare déchus et spoliés de ces fiefs les cousins Ludovic II et Pierre Luc II Fieschi.

Monnaies frappées sous ce règne : en or : écu au soleil ; en argent : testons de six types, cornabo, rolabasse et les contrefaçons du teston de Bellinzona ; en billon : monnaies de Soletta, de Modène, de Milan et de Carmagnole.*

 

 * Elio Biaggi, Monnaies d'Italie, Savoie Piémont - BNF

 


 

CASTIGLIONE DELLE STIVIERE

Castrum Stiliconis ou Castilio Stiveriorum, grosse bourgade de la province de Mantoue.

Il fut le siège des Gonzagues qui, dans la deuxième moitié du XVIe siècle, y battront monnaie faisant suite au diplôme impérial d’investiture de Maximilien II daté de 1572.

L'atelier est définitivement fermée en 1723 lorsque les habitants se rebellent contre les Gonzaga pour se mettre sous la domination de l'empereur Charles II.*

 

*  Alberto Varesi, Monete Italiane Regionali, Lombardia, zecche minori.




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